vendredi 21 février 2014

Koenraad Ecker - Ill Fares The Land


Date de sortie : 17 février 2014 | Label : Digitalis Recordings

Une bizarrerie aux lueurs estompées par la brume, au coeur désagrégé par le posthume. Une manière tout à fait singulière de décrire l'aù-delà. Un ailleurs parfaitement hostile mais foisonnant, et libéré du prévisible. Un attrait tout particulier pour la non-linéarité, qui se défait de tout schéma de composition classique. Les morceaux suivent une logique, au demeurant standard, en réalité bien plus tordue qu'il n'y paraît, nous malmenant à leur guise, sans aucun pouvoir de résistance. Mais cette logique, finalement, nous échappe. Nous passons bien souvent du coq à l'âne (le titanesque titre introductif - Oran - étant à coup sûr le plus parlant des exemples), mais sans équivoque la narration reste pertinente, car cohérente. L'utilisation des basses fréquences est plus que bien amenée. Les rythmiques, loin d'être le soutien porteur de l'édifice, s'invitent dans la danse avec justesse, à des instants propices mais souvent inattendus.

Ill Fares The Land est un album difficile à classer, quelque part entre ce qui semble être de l'improvisation analogique au service d'un métrage aux teintes noirâtres et un schéma mathématique extrêmement précis, dénué d'une quelconque forme de légende et de ce fait, duquel il est simplement hasardeux de tirer des conclusions. Koenraad Ecker joue avec nos nerfs, il est tout bonnement impensable d'appréhender ce disque le cul sur sa chaise en attendant que ça vienne. Le trip se vit, bel et bien, à notre insu. Qu'il soit agréable ou non. Le plus souvent d'ailleurs, il ne l'est pas. Une fois imprégné de cet univers, le retour n'est plus envisageable, chaque morceau marquant nos carcasses enchaînées au fer rouge. Cette empreinte, une blessure bien réelle, que chaque plage de textures vient faire suppurer encore et encore, ne lui laissant aucunement le soin de se rétablir.

Il reste assez incroyable de constater à quel point cet album tient en haleine. Rares sont les moments d'égarement, de lassitude. Inexistantes sont les fausses notes. C'est de cette constatation précise que découle la solution du dilemme mentionné plus haut. Ill Fares The Land relève de la géométrie pure. Tout est ciselé et composé de manière à tendre vers cette forme d'exactitude. Pour le coup, c'est plus que réussi, le cercle est parfaitement dessiné. Finalement, pour une oeuvre aussi "rebutante" et au premier abord improvisée que celle-ci, la minutie des arrangements est à saluer. La pertinence du rythme imposé est à applaudir des deux mains.

Un album qui réserve son lot de surprises, qui n'hésite pas à tacler dès que l'occasion se présente (écoute moi Stuffed Man, tu verras bien). Mais rien ne sert de gâcher le plaisir (dégoût) qui vous attend en épiloguant davantage sur ce monstre. Chaque réécoute laisse derrière elle un sentiment persistant. Quelle claque. L'écoute au casque est incroyable. Vivement recommandé, un des disques de ce début d'année 2014.

_inoui_

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